FREDA

C’était le 14 juillet 2021. Une grande salle, des yeux qui pétillaient dans l’attente que le rideau s’ouvre : elle retenait son souffle, immergée par une joie indicible car l’un de ses plus grands rêves était sur le point de se réaliser. Imaginez les ressentis d’une équipe de football qui va représenter son pays dans la Coupe du Monde après plus de 20 ans d’absence. Et le rideau s’ouvrit, et Freda, ce film d’une heure et trente-trois minutes, fut présenté devant les cinéastes, les médias, les gens de tous horizons qui étaient venus participer au Festival de Cannes. Après la projection, les assistants se mirent debout et une ovation de huit minutes fit retentir la salle, expression de leur satisfaction et de l’impact vibrant qu’a eu sur eux le visionnage du film. Et la mention spéciale « Découverte Prix François-Chalais » a été décernée à Freda. « Veni, vidi, vici. » Gessica Généus aurait pu à ce moment emprunter cette phrase célèbre de Jules César après la conquête de la Gaule, d’autre en plus que le Festival se déroulait en territoire gaulois.

    Et depuis Freda n’a pas cessé de collecter des prix de festival en festival. Dans la liste nous pouvons mentionner :

–  L’étalon d’argent lors de la 27e édition du FESPACO au Burkina Faso. 

– Le Prix du Film Francophone TV5 Monde 2021

–  Le Prix international du long-métrage au Festival du film féminin Dortmund/Cologne

– Le Grand Prix de fiction du 20ème Festival du film et forum international sur les droits humains (FIFDH) à Genève (Suisse)

Voulant exposer « aux yeux du monde quelques aspects du pénible quotidien des femmes haïtiennes » (Radio Lakay), Gessica Généus a réuni un casting intéressant dont fait partie Néhémie Bastien incarnant le personnage principal : Freda. 

Freda c’est l’histoire d’une jeune fille vivant avec sa mère, son petit frère et sa petite sœur dans un quartier populaire de Port-au-Prince. Violée par le compagnon de sa mère alors qu’elle n’était qu’une enfant, elle fut réduite au silence par sa mère qui ne voulait pas que l’affaire s’ébruite, question de préserver l’honneur familial. Ayant connu toutes les privations auxquelles sont en proie les gens de sa condition, elle s’est néanmoins forgée un mental d’acier, s’efforçant de rester honnête et positive. Malgré la tendance des jeunes de son environnement à quitter le pays, malgré le fait que son petit ami lui propose de partir avec elle en République Dominicaine pour fuir la misère et le climat insécure du pays, elle s’obstine à rester en Haïti car elle ose croire en un lendemain meilleur sur la terre de Dessalines.

Interrogée sur les motifs qui l’ont poussé à la création de cette œuvre, Gessica Généus s’exprime en ces termes :

       « Je voulais avant tout faire exister un point de vue féminin sur la société haïtienne… l’analyse de la situation de notre pays est monopolisée par les hommes… Dans une société aussi patriarcale que la nôtre, les femmes ne sont pas en haut de l’échelle. Il y a donc un silence qui leur est imposé tant au niveau de la sphère publique que dans le quotidien. Mon film fait écho à ce que j’ai vécu en tant que jeune femme dans ce pays… Les hommes disparaissent et ont le droit de le faire. Ils ont le droit d’aller ailleurs, d’exister ailleurs. Alors que la femme est comme dans un étau et doit vivre là. » 

Avec Freda, le cinéma haïtien fait un impact assez intéressant sur les cinéphiles à travers le monde. Et on peut dire que c’était tout à fait INATTENDU !

Rédaction : Steeve Charles

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